Créer un site internet

l'ordre du temple

un peu d'histoire...

                

blason-region-fr-champagne-ardenne.png 

 

Champagne

Issu de l'époque carolingienne, le comté de Troyes est réuni à celui de Meaux dès la fin du Xème siècle par le comte Herbert le jeune, petit-fils d'Herbert II de Vermandois qui le premier porte le titre de comte de Champagne et de Brie. En 1013, à la mort d'Etienne de Vermandois, fils d'Herbert le jeune, c'est son cousin Eudes II de Blois qui reçoit l'ensemble de l'héritage à l'exception de Reims, cité des sacres et du prestigieux Saint Rémi qui sera toujours lié aux capétiens. Le fils d'Eudes II, Thibaud III de Blois, hérite de cette Principauté. Il sera le premier comte de Troyes à se nommer Thibaud, c'est pourquoi on le connait sous le nom de Thibaud 1er.

     Fils aîné de Thibaud Ier et de Gersent du Mans, Etienne-Henri naît vers 1047. Cité pour la première fois en 1061, il exerce d'abord son activité en Anjou pendant que son père assure son pouvoir en Champagne. Né aux environs de 1074, Hugues est le troisième fils de Thibaud Ier et de Adèle de Valois.

En 1077, Etienne-Henri apparaît avec le titre de comte de Champagne dans un acte de Philippe Ier contre lequel il se rebelle en 1088. Emprisonné par le Capétien, Etienne sert ensuite fidèlement le roi, notamment lors de la révolte du comte de Corbeil, Bouchard II. En 1084, Etienne-Henri épouse Adèle de Normandie, fille de Guillaume le Conquérant. Dès 1085, Thibaud Ier avait abandonné à Etienne-Henri le gouvernement du comté de Blois. A la mort de leur père en 1089, les enfants nés des deux lits se partagent le patrimoine familial. En sa qualité d'aîné, Etienne-Henri conserve les comtés de Chartres, Sancerre et Blois auxquels il ajoute ceux de Meaux, Provins et Saint-Florentin, tandis que Eudes IV (1088-1093) puis Hugues (1093-1125) issus d'un second mariage avec Adèle de Bar sur Aude hérite du comté de Troyes. Quatre années plus tard, le 1er janvier 1093, Hugues hérite de son frère Eudes IV des comtés de Troyes, Vitry et Bar-sur-Aube. Hugues, premier à prendre officiellement le titre de comte de Champagne, est aussi le premier à s'installer à Troyes. En 1093, Il épouse Constance de France, fille du roi Philippe Ier, union qui sera annulée à la Noël 1105, le couple n'ayant pas eu d'enfant. Le dernier frère, Philippe, est élu évêque de Châlons en 1093 et sacré deux ans plus tard.

Donc en 1093, le comté de Champagne n'existe pas encore réellement. Il est constitué d'un ensemble de seigneuries dont plusieurs ont rang de comté. Le comté de Troyes y voisine avec ceux de Brienne, Arcis, Ramerupt et Rosnay. Autour d'eux gravitent des seigneuries vassales : Villemaur, Trainel, Pont sur Seine, Plancy, Mareuil, Epernay, Arcis, Dampierre, Vitry, Moeslains, Joinville, Vignory, Bar su Aude, La Ferté, Chacenay, Bar sur Seine, Chappes et Vendeuvre. Cet ensemble forme le comté de Champagne que le comte Hugues va s'employer à consolider autour de Troyes, sa capitale.                      

Pour ses comtés de Troyes, de Bar sur Aude ainsi que ses possessions méridionales, Hugues de Champagne est vassal du Duc de Bourgogne et de l'évêque de Langres. Il se rapprochera encore de la Bourgogne en épousant en seconde noce, Elisabeth de Varais, fille du comte de Macon : Etienne le hardi.  Pour le reste de ses territoires, Hugues a pour suzerain le comte de Blois qui, en 1093, est son propre demi-frère Etienne Henri, gendre de Guillaume le conquérant et par conséquent beau-frère du roi d'Angleterre Henri 1°, par ailleurs duc de Normandie. La fille de ce dernier sera mariée à Geoffroy Plantagenêt, fils du comte Foulques d'Anjou, futur roi de Jérusalem tandis que la sœur de Geoffroy épousera le comte de Flandres : Thierry. Le comte Hugues de Champagne et encore plus son neveu Thibaud II seront alliés aux comtés de Flandres, d'Anjou, de Bourgogne, de Normandie et d'Angleterre, ce qui ne sera pas sans susciter la défiance des rois de France. Pour preuve de cette crainte, le roi de France offre sa fille, Constance, en mariage à Hugues de Champagne pour contrecarrer le roi d'Angleterre qui donna sa fille Adèle au comte de Blois, Etienne Henri, le demi-frère d'Hugues.

Le règne d'Etienne-Henri est essentiellement marqué par la Croisade, au Proche orient, déclenchée par le pape Urbain 2, lors du concile de Clermont (1095). C’est le départ massif de la première croisade. Parmi les premiers seigneurs à répondre à l'appel d'Urbain II, il quitte Coulommiers l'année suivante en compagnie de son beau-frère, le duc de Normandie Robert Courteheuse, et de son cousin le comte de Flandre Robert II. L'armée rejoint alors Rome mais doit patienter jusqu'en mars 1097 pour embarquer. Etienne-Henri et Robert Courteheuse atteignent Constantinople en mai, rejoignent Nicée en juin et arrivent devant Antioche en octobre. Mais le siège traîne en longueur et Etienne-Henri décide de rentrer le 2 juin 1098, deux jours avant la chute de la ville. Son retour en Occident est considéré comme un acte de lâcheté. Ecoutant les conseils de sa femme, il reprend la route de la Terre Sainte en 1100 à la tête d'un petit contingent composé des évêques de Laon et de Soissons, des comtes de Bourgogne, de Toulouse et de Mâcon et de quelques seigneurs champenois. Il participe à la prise de Tortose en février 1102, rejoint le roi Baudouin Ier à Beyrouth et arrive à Jérusalem pour Pâques. Il est tué le 19 mai suivant au cours de la bataille de Ramalah. La nouvelle de sa mort ne fut connue en Occident qu'en novembre 1103. Adèle de Normandie, qui gouvernait le comté de Blois depuis 1096, assure la régence de son fils Thibaut jusqu'en 1109.

Bourgogne

En 1097, Robert de Molesme érige en abbaye le prieuré d’Aulps et désigne Guy comme premier abbé. Les dépendances de Molesme comptent déjà de trente à quarante prieurés. À Pâques, alors que les croisés ne sont qu'en Asie Mineure, Molesme est le rendez-vous des barons de Champagne, convoqués par le comte Hugues qui y tient sa cour, avec dames, chevaux et chiens ! Parmi ses vassaux, on remarque son frère Philippe, évêque de Châlons, son sénéchal, Grosbert le Roux, Gui III de Vignory et Dudon vidame de Châlons.

Ceci est trop pour Robert qui constate par ailleurs qu’il ne peut triompher de la résistance des opposants à sa réforme. Mais il ne saurait davantage se résigner à l’abandon de l’idéal constamment visé par lui, depuis la fondation de Molesme. Aussi, accompagné d’Albéric, d’Étienne et de quatre autres moines, il part durant l’hiver à Lyon où le petit groupe obtient du légat apostolique, l’archevêque Hugues de Romans, la permission de fonder un établissement nouveau sur des bases nouvelles. Robert et vingt et un moines quittent alors Molesme et « se mettent joyeusement en marche vers un désert appelé Cîteaux ». Ce petit essaim s’installe dans l’alleu de Cîteaux, qui lui est donné par Renard, vicomte de Beaune, et sa femme, Jourdaine de Montmorot, un peu plus au nord du monastère actuel, au lieu-dit à présent « La Forgeotte ». Ayant l’agrément de Gauthier, évêque de Chalon, dans le diocèse duquel se trouve ce lieu, avec le bois de la forêt qu’ils défrichent, ces premiers moines édifient les locaux nécessaires à la vie conventuelle. L’établissement prend alors le nom de : « Nouveau Monastère Sainte-Marie ». Robert reçoit de l’évêque de Chalon avec le bâton pastoral, la charge des moines. Les frères venus de Molesme renouvellent entre ses mains leur profession religieuse et promettent stabilité en ce « Nouveau Monastère ». Celui-ci est alors érigé canoniquement en abbaye.

Mais les moines restés à Molesme ne tardent pas à constater qu’ils ont perdu l’estime des seigneurs du voisinage. « Ils sont devenus odieux aux barons et à leur entourage », disent-ils dans la supplique qu’ils font porter au Pape pour récupérer leur abbé. « Ce n’est pas faux, car Guillaume II, comte de Nevers, mit alors le feu à une dépendance du monastère. » Robert avait fondé Cîteaux avec la permission du légat du Pape. Pour le faire revenir, les moines de Molesme vont donc s’adresser au Pape lui-même, Urbain II. Celui-ci remet l’affaire à l’archevêque de Lyon, son légat, Hugues de Romans, celui-là même qui avait donné à Robert l’autorisation de fonder le « Nouveau Monastère”. Hugues convoque une assemblée d’évêques et d’abbés à Port d’Anselle. En suite de quoi, Robert reçoit l’ordre de quitter son abbaye de Cîteaux pour rentrer à Molesme. Robert s’incline devant cette décision, et au printemps 1099, il retourne dans son monastère d’origine, avec quelques moines « qui n’aimaient pas le désert ».

Deux années de suite, en 1100 et 1101, saint Robert reçoit dans son abbaye de Molesme le comte de Champagne, Hugues, qui va y passer les fêtes de Pâques et, de concert avec sa femme Constance, fille du roi de France Philippe Ier, fait à ce monastère d'importantes donations (1). (1) Histoire des ducs et comtes de Champagne, par M. d'Arbois de Jubainville, t. II, p. 78. — D'Achery, Spicilége, t. IV, in-4", pp. 237-244. (2) D'Achery, l. c. — Mansi, t. XX, pp. 1179 fit suivantes.

Entre 1100 et 1102 on trouvera, premièrement, sur le cartulaire de Molesme un nommé Hugo de pedano, Montiniaci dominus que Thierry Leroy dit être Hugues de Payns premier maître de l’ordre du Temple. Il n’est alors que seigneur de Montigny suite à son mariage avec une fille de la famille de Montbard, qui possède le château de Montigny-Montfort. De cette union naîtra un fils André que l’on retrouvera lié de prêt au Templiers d’Espagne. La seconde mention du futur maître du Temple apparaît sur un acte rédigé à Attigny dans une charte émanant de la comtesse Constance sur laquelle figure le nom de Hugo de Pedans (Hugues de Payns) sans titre de domaine. Certains auteurs affirment que c’est au retour de son premier voyage en terre sainte que Hugues de Payns se voit confier le domaine de Payns par le comte de Champagne (3). Si on en croit cette affirmation, sur les chartes de 1100 signées Hugues de Paenciis et Hugo de Pedans, Payens ne signifierait pas le village de Payns mais la milice du comté. (3) https://lecycledescroisades.wordpress.com/

Il est à noter que le terme Hugo dominus de Peanz que l’on trouve dans une charte de 1113 de Milon de Bar-sur-Seine ne peut signifier que Hugues seigneur du péage ou de la milice et non seigneur de la ville de Payns, qui devrait s’écrire Hugo Peanz dominus à l’instar de Hugo Montiniaci dominus. Le nom de la ville étant placé devant le titre de noblesse (Andreas Rameru comes, Hugo Campani comes).

Robert laisse la communauté de Cîteaux aux mains d’Aubry, l’un des plus fervents partisans de la rupture avec Molesme. Aubry, administrateur efficace et compétent, obtient la protection du pape Pascal II (Privilegium Romanum) qui promulgue le 19 octobre 1100 la bulle Desiderium quod. Aubry, confronté à de nombreuses difficultés matérielles, déplace sa communauté deux kilomètres plus au sud, au bord de la Vouge, pour trouver un approvisionnement en eau suffisant. Une église est édifiée sur ses ordres à quelques centaines de mètres du site initial. Le 16 novembre 1106 Gauthier, l’évêque de Chalon, consacre sur ce nouveau site la première église construite en pierre. Aubry parvient à maintenir la ferveur spirituelle au sein de sa communauté, qu’il soumet à une ascèse très rude. Mais Cîteaux végète, les vocations se font rares et ses membres vieillissent. Cependant, la protection du duc de Bourgogne, puis de son fils Hugues II après 1102, et des clercs édifiés par le courage de la communauté, permet un premier essor. À partir de 1100, le monastère attire quelques recrues : quelques novices rejoignent le groupe. Pendant son abbatiat, Aubry fait adopter aux moines l’habit de laine écrue contre la robe noire des moines de l’ordre de Cluny, ce qui vaudra aux moines cistercien le surnom de « moines blancs », parfois aussi de « bénédictins blancs » ou encore de « Bernardins », du nom de saint Bernard, à l’opposé des bénédictins ou « moines noirs ».

Aubry définit aussi le statut des frères convers, ces religieux qui ne sont ni clercs ni moines, mais soumis à l’obéissance et à la stabilité et qui accomplissent le gros des tâches manuelles ; il fait entreprendre le travail de révision de la Bible.

La rédaction de celle-ci, réalisée sous la conduite d’Etienne Harding, élu à la charge d’abbé, dont le monitum (avertissement) situé à la fin du premier tome est daté de l’année 1109 (f.150 du ms.3) et précise les conditions de réalisation du manuscrit. Il indique qu’après la réalisation de sa bible, il s’est consacré à une révision de son texte ; ayant constaté de nombreuses discordances dans les copies disponibles, il se proposait de revenir à la version textuelle de la vulgate de Jérôme en faisant appel à des juifs expérimentés dans leur langue et dans leurs écritures pour effectuer des comparaisons avec des textes hébraïques. Le second tome (ms.14-15) est achevé deux ans plus tard. Le plus célèbre des savants juifs de l’époque, Rachi, œuvrait juste à côté des moines cisterciens, à Troyes, et plus tard, on sait qu’Etienne Harding a fait venir à Cîteaux en 1115 un moine de la Chaise-Dieu très versé dans les textes hébreux.

Champagne

Au cœur de l’Aube, l’ancien comté de Champagne comptait de prestigieuses communautés juives médiévales du XIe au XIIIe siècles. Rachi, Rabbi Salomon fils d’Isaac, immense commentateur des textes sacrés du judaïsme, y naît à Troyes en 1040. Il donne une impulsion inattendue à la créativité intellectuelle des Juifs de Champagne. Dès le XIIe siècle, les comtes Thibaud II de Champagne puis Henri Ier le Libéral, favorisent l’effervescence intellectuelle du comté. Ils partagent la compagnie de nombreux érudits tels que Bernard de Clairvaux, Chrétien de Troyes, Pierre le Mangeur (Petrus Comestor) ou Abélard, et communiquent avec les Sages des communautés juives de Champagne dans une certaine convivialité. Au XIIIe siècle, la Champagne riche et puissante, regroupera près de 50 communautés juives prospères dont Troyes et Ramerupt. Ainsi, depuis Troyes, Rachi consacre toute sa vie à commenter le Talmud et la Bible hébraïque. Erudit accompli, il est consulté par de nombreuses communautés. Il meurt à 65 ans, le 13 juillet 1105. Une des filles de Rachi, nommée Yohebed, y fut l’épouse du Rabbi Meïr de Ramerupt, bon talmudiste élève de Rachi. Leurs trois fils furent les savants tossafistes Juda, Samuel dit le Rachbam et Jacob, connu sous le nom de Rabbin Tam. Le Rabbin Tam dirigea à Ramerupt une yeshiva qui fut la plus prestigieuse de son époque. D’ailleurs, l’autorité morale et intellectuelle du Rabbin Tam dépassait très largement le cadre champenois ; de même qu’il attirait à Ramerupt des étudiants venus de tout le monde juif achkenazim, il en convoquait les représentants à Troyes pour y constituer ces réunions appelées Synodes. Au milieu du XIème siècle, Troyes devait déjà abriter une bibliothèque de manuscrits hébraïques considérable.

Au mois d'avril de l'année 1104, saint Robert assiste à un concile qui se tient dans la ville de Troyes, sous la présidence de Richard, cardinal évêque d'Albano, et où d'importantes affaires sont agitées. On y confirme les donations faites quelques temps auparavant par le comte de Champagne à l'abbaye de Molesme (2). Quelques jours plus tard, à Pâques, se tient à Molesme une grande assemblée féodale où se rencontrent la Bourgogne, la Champagne et le Nivernais. André comte de Ramerupt et son fils Hugues « brito » sont présents.

En1104, Hugues de champagne est victime d'un attentat. Une fois remis de ces blessures, il prépare son départ pour la terre sainte. Il sera accompagné de Hugues de Payns (que je pense être Hugues « brito ») (1) et sans doute de Etienne Harding qui disparaît des chapitres de Cîteaux. En effet, à dater du moment de l’admission de Etienne Harding, qui eut lieu en l’année 1106, il y a une grande lacune dans les annales de Cîteaux. La plus grande partie des chapitres du grand et du petit exordium, qui avaient rapport au gouvernement d’Albéric ont été perdu, et il n’est plus question de Etienne jusqu’à la mort d’Albéric, arrivée en 1109. D’autre part, Hugues de payns ne sera plus nommé « seigneur de Montigny ». Veuf, il semble renoncer à son titre pour partir en terre sainte. (1) extrait de l’interrogatoire d’Hugues de Paraud, grand maître du Temple en France en 1294 : « le visiteur se levant dit à l’assemblée : Allons ! Adorons la tête ! Offrons nos hommages à celui qui nous a fait ce que nous sommes et qui nous continue sa protection. Tous, s’inclinant devant cet ordre, adorèrent la tête avec grande révérence. J’ai ouï dire que cette tête était celle du premier grand maître du Temple, Hugues de Pagnes (sic) du nœud du cou jusqu’aux épaules, elle était incrustée d’or, d’argent et de pierres précieuses.". www.templiers.net/auguste-pete/index.php?pape=maison-de-bolieu-et-le-proces. ». Engelbertus de Yspania est traduit par Engilbert des pagnes dans « la terre, le pouvoir et la paix (910- vers 1120) page 127 http://theses.univ-lyon2.fr/documents/lyon2/1999/mehu_d/pdfAmont/mehu_d_chapitre01.pdf. Hugues « brito » de Ramerupt est nommé Hugonem comitem de Hyspania en 1082 sur une donation à l'Eglise de Sainte Marie de Ramerupt.

Terre sainte

Le 18 juillet 1100, Godefroy de Bouillon, duc de Basse-Lotharingie, avoué du Saint-Sépulcre, décède à Jérusalem, après une expédition à Damas. Son frère Baudoin, préférant le trône de Jérusalem au comté d’Edesse, qu’il confie à son cousin Baudoin du Bourcq, s’empresse d’arriver à Jérusalem. Désigné depuis longtemps par son frère comme son successeur, Baudoin monte sur le trône. Benjamin de la fratrie, celui qui n’apparaissait dans aucun héritage familial, destiné à devenir un ecclésiastique était enfin assis sur l’un des trônes les plus convoités.il se fit couronner roi de Jérusalem, le 25 décembre 1100.

Guillaume 1°, châtelain de Saint-Omer, assistera utilement Robert II de Flandre, dit de Jérusalem, dans ses principales entreprises. Hugues et Geoffroi, ses frères, immortalisent le nom de Saint-Omer dans la Palestine en contribuant fortement à la prise de la cité sainte. Hugues reçoit en récompense la principauté de Galilée et la seigneurie de Tibériade, concédée avec déférence par Tancrède.

En 1102 Baudoin a pour lieutenant Hugues de Saint-Omer, prince de Galilée, qui élèvera plusieurs châteaux en terre sainte, comme celui de Toron en 1105. A cette époque, Baudoin Ier se souciait, essentiellement, d’assurer la marche tranquille des pèlerinages, ce qui prouve qu’une certaine paix régnait déjà dans son domaine. En 6 ans, 1100-1106, Baudoin réussit la mission de sécuriser les alentours de la ville sainte.

Jérusalem aux mains des croisés en 1099, la mosquée Al-aqsa ne fut pas détruite et devint l’habitation du roi Baudoin Ier à partir de 1104 sous l’appellation « Palais du roi Salomon ». Secret des templiers – templiers-chevaliers.com.

En 1104, Hugues de Payens et Hugues de Champagne (sans doute accompagnés d’Etienne Harding) se rendant en Palestine, passent par l’abbaye de Molesme puis par Auxerre et Dijon où le comte signe plusieurs chartes. Entre 1104 et 1107, ils sont en Palestine, probablement logés à l’hôpital St-Jean de Jérusalem. Le pèlerinage en terre sainte consistait généralement en un simple aller-retour. Pour preuve, un grand nombre de participants à la première croisade sont revenus chez eux dès leur but atteint, et ce, malgré les difficultés endurées. Hugues de Champagne, lui, restera parti pendant quatre ans.

 Le comte de champagne est un homme important en France, il est donc probable qu’il ait rencontré le roi Baudoin et se soit entretenu sur l’état d’urgence qui règne à Jérusalem. En effet les chrétiens y sont peu nombreux, retranchés derrière les murs de la ville sainte et attendent que de nouveaux occidentaux viennent peupler le royaume. Dès qu’ils sortent de la ville, ils sont rançonnés, volés ou tués par les bandes de pillards sarrasins. L’armée du roi Baudoin veille mais n'est pas assez nombreuse pour faire face aux combattants embusqués. L'arrivée du comte de Champagne fut une réelle bénédiction pour le royaume, peut-être offre-t-il un soutien financier. C’est sans doute également à cette occasion qu’Hugues de Payns rencontre Geoffroy de Saint-Omer, soucieux aux côtés du roi de la sécurité des pèlerins.

En fin d’année 1107, la troupe regagne la France. Le roi Baudoin fit don des « écuries »de son palais aux futurs templiers en 1108.

Les premiers chevaliers du Temple effectueront d’importants travaux, entre 1106 et 1116, notamment dans les anciennes "Écuries de Salomon". Ces salles voûtées, faisant 83 mètres de long pour 60 mètres de large et 9 mètres de hauteur, ont été construites par Hérode Ier le grand pour servir de soubassement nivelant la cour du mont du temple et réduire la pression des murs de soutènement. Elles devaient servir de zone de stockage. Les Templiers furent probablement les premiers à en faire des écuries. Les fondations de la Mosquée Al-aqsa et du dôme du rocher seront également méthodiquement fouillés.

 

Un tunnel court depuis le mur de soutènement sud du Mont du Temple sous les "Écuries de Salomon". Au bout de 30 mètres, le tunnel est obstrué par des pierres et débris et les archéologues n'ont pas pu mener d'investigations au-delà en raison du refus des autorités musulmanes. Mais, vu le mode de construction du tunnel, souvent avec de gros blocs datant de l'époque de Temple d'Hérode, les archéologues en ont conclu qu'il a été bâti comme une poterne par les Templiers.

 L'entrée se serait située quelque part en surface et la sortie au niveau du mur sud aurait permis aux Templiers de lancer des attaques surprises contre leurs ennemis.

Mais revenons en 1108, les premiers chevaliers du Temple intègrent leur future résidence, la transforme pour accueillir de nombreux chevaliers qui ne les rejoindront, semble-t-il, que vingt ans plus tard en 1129. 

La création de l’ordre du temple ne s’est pas faite dans le but un peu simpliste de protéger les pèlerins sur les routes mais répond à une démarche longuement réfléchie voire une quête mystique plus ou moins commanditée par les moines cisterciens et Bernard de Clairvaux. Les travaux effectués au « temple de Salomon » se situe entre le premier et le second voyage d’Hugues de Champagne et Hugues de Payns, avant que l’ordre ne soit officiellement formé. Il est possible que ces deux seigneurs aient contribué au financement. Ils étaient accompagnés par Etienne Harding, abbé de Cîteaux.

Bourgogne

En 1109, Étienne Harding prend en main les destinées de Cîteaux en succédant à Aubry après la mort de ce dernier. Étienne, noble anglo-saxon à la solide formation intellectuelle, est un moine formé à l'école de Vallombreuse qui a déjà joué un rôle majeur dans les événements de 1098.

La ferveur des moines confère à l’abbaye une grande renommée. Les quatre premières années d’Etienne furent très difficiles. Comme sous Albéric, les vocations continuèrent à rester rares et précaires. De 1109 à 1112 les historiens signalent d’importantes famines, et le domaine encore modeste de Cîteaux ne suffit plus bientôt à assurer la subsistance des frères. De plus, peut-être par suite d’épidémies, des morts rapprochées diminuèrent notablement l’effectif restreint de la communauté qui ne se renouvelait pas. Mais si la vie à Cîteaux n’attirait pas d’imitateurs, elle suscitait bien des admirateurs qui virent à son secours. Etienne entretient d'excellents rapports avec les seigneurs locaux. En 1110, la bienveillance de la châtelaine Elisabeth de Vergy et du duc de Bourgogne assure l’essor matériel de l’abbaye. La mise en valeur des terres assure à la communauté les ressources nécessaires à sa subsistance. Mais de telles largesses entraînaient une reconnaissance normale envers les bienfaiteurs et risquaient aussi de créer des droits pour ceux-ci, comme le droit de gîte qui amenait au monastère un nombre considérable de gens et risquant de réitérer la triste expérience de Molesme. Etienne et ses frères prirent alors une mesure audacieuse et interdire à tout seigneur de tenir sa cour à Citeaux. Ainsi garanti contre ces ingérences extérieurs, Etienne s’attacha à continuer l’œuvre entreprise par son prédécesseur : le scriptorium. La bible dite de saint Etienne Harding, recension critique du texte latin à partir du texte hébreu, avec l’aide de rabbins juifs, fut achevée en 1111.

En avril 1112 ou en mai 1113, le jeune chevalier Bernard de Fontaine, accompagné d’une trentaine de compagnons, dont ses quatre frères et son oncle, fait son entrée au monastère dont il va bouleverser les destinées. Avec l’arrivée de Bernard, l’abbaye connaît une embellie et la réforme cistercienne ne tarda pas à se répandre dans toute l'Europe. Les postulants affluent, les effectifs croissent et poussent Étienne Harding à fonder des « abbayes-filles ». La Ferté en 1113, Pontigny en 1114, Morimond et Clairvaux en 1115.

Terre sainte

Après la conquête de Jérusalem, un chevalier provençal, Géraud et quelques compagnons reprennent la fondation des amalfitains pour s’occuper des malades et des pèlerins. Cette fondation avait débuté vers 1048, lorsque des marchands Amalfitains, dont la cité voisine de Naples était l’un des principaux centres de commerce avec l’orient, avait obtenu du calife d’Egypte, également souverain de Jérusalem, une concession dans la partie chrétienne de la ville sur l’emplacement de la maison de Zacharie (père de Jean le Baptiste) où ils avaient fait construire une église, sainte marie latine, un monastère d’hommes, un monastère de femmes, une auberge et bientôt un hospice. En 1099, Godefroy de Bouillon fut désigné roi de Jérusalem par ses pairs, titre qu’il refusa, préférant porter celui d’Avoué du Saint-Sépulcre. Il mit en place l’ordre des chanoines du Saint-Sépulcre qui avait pour mission d’aider à toutes les tâches le patriarche de Jérusalem. Un certain nombre d’hommes d’arme, issus de la croisade, se mirent alors au service du patriarche afin de protéger le Saint-Sépulcre. Tous les hommes chargés de la protection du saint-sépulcre logeaient à l’hôpital situé près de l’église du Saint-Sépulcre. Osmth.gisors.fr. Il est probable que Hugues de Payns intégra cette institution dès 1115. Sa devise est Deus lo vult, qui se traduit en français par Dieu le veut. Devise reprise plus tard par les Templiers.

Une institution similaire constituée de chevaliers, appelés chevaliers de Saint-Pierre (milites sancti Petri), fut créée en Occident pour protéger les biens des abbayes et églises. Ces chevaliers étaient des laïcs, mais ils profitaient des bienfaits des prières. Par extension, les hommes chargés d’assurer la protection des biens du Saint-Sépulcre ainsi que de la communauté des chanoines étaient appelés milites sancti Sepulcri.

En 1109 est fondé l’Ordre des Hospitaliers. Reconnu officiellement en 1113(1), il fut chargé de s’occuper des pèlerins venant d’Occident, une idée naquit alors : créer une milice du Christ (militia Christi) qui ne s’occuperait que de la protection des pèlerins sur les chemins de Terre Sainte, en proie aux brigands locaux. (1) C'est le papePascal II dans une bulle Pie postulatio voluntatis datant du 15 février 1113 qui fait du fondateur, le recteur Gérard, « instituteur et prévôt du xenodochium de Jérusalem ». Il obtient divers privilèges, avantages et exceptions pour l'Hospital, une institution, une sorte de congrégation, sous la tutelle et protection exclusive du pape. La bulle précise également qu'à la mort de frère Gérard, les frères éliront entre eux son successeur. (Harot 1911), p. 10) Beltjens (1995), p. 192-193-Demurger (2013), p. 61Demurger (2013), p. 58.

Ainsi, les chanoines s’occuperaient des affaires liturgiques, l’ordre de l’Hôpital des fonctions charitables et la milice du Christ de la fonction purement militaire de protection des pèlerins. Cette répartition trinaire des tâches reproduisait l’organisation de la société médiévale, qui était composée de prêtres (oratores), de guerriers (bellatores) et de paysans (laboratores). C’est ainsi que l’ordre du Temple, qui se nommait à cette époque militia Christi, prit naissance. https://www.histoiredumonde.net/Les-Templiers.html

Champagne

Dès 1113, le comte Hugues de Champagne décide de repartir en terre sainte au côté d’Hugues de Payns. Une charte indique même qu’il désirait s’engager dans le tout nouvel ordre des chevaliers de Saint Jean de l’Hôpital afin de protéger le saint Sépulcre. Le comte, récemment marié à Elisabeth de Varais, fille de Etienne le Hardi et nièce de Mathilde duchesse de Bourgogne, cherche à la répudier, au point que la comtesse doit demander l’aide de l’évêque de Chartres Yves, pour que celui-ci fasse comprendre au comte qu’un mari ne peut se séparer de sa femme sans le consentement de celle-ci, même pour entrer en religion. Il part en Août 1114 mais rentre en fin d’année 1115. De retour chez lui, le comte gouverne encore sa principauté pendant une dizaine d’années, reportant son affection sur son neveu, Thibaud de Blois, qu’il considère comme son héritier. Il reprend ensuite contact avec Etienne Harding pour offrir à l’Ordre de Cîteaux, dans la forêt de Bar-sur-Aube, un territoire connu sous le nom de vallée d’absinthe, avec pour mission d’y fonder une abbaye. Pour diriger cette fondation, Etienne désigne un jeune abbé, Bernard de Fontaine, qui accompagné de 12 moines soigneusement choisis (l’un d’eux avait même été mandé par la Chaise-Dieu, bien qu’il ne fût pas cistercien) créa, au lieu-dit, l’abbaye de Clairvaux. Le comte va dès lors favoriser autant que faire se peut, l’expansion de l’Abbaye fondée en grande partie sur ses fonds. À cette époque, le comté de Champagne, fief parmi les plus puissants du royaume de France, est au cœur des principaux échanges politiques, économiques, religieux et culturels. En cela, l’histoire de la Champagne se confond souvent avec celle de l’Occident et de l’Orient. Voie privilégiée de circulation, carrefour entre les pays de la Méditerranée et ceux de la mer du Nord, la Champagne accueille toute l’année à Troyes, Provins, Lagny et Bar-sur-Aube le plus grand marché commercial et financier de l’Occident médiéval. Les débuts de Clairvaux sont difficiles, la discipline imposée par Bernard est sévère. Bernard, quant à lui, poursuit ses études sur l’Ecriture Sainte et sur les Pères de L’Eglise, il a une prédilection presque exclusive pour le cantique de Salomon et pour Saint Augustin.

Terre sainte

Hugues de Payns, quant à lui, quitte femme, enfants et seigneurie. Établi durant quelques années en Terre sainte, il met son épée au service des chanoines du Saint-Sépulcre – gardiens du tombeau du Christ – en compagnie de Godefroy de St-Omer. Ils sont alors sous l’autorité des chanoines du St-Sépulcre et ont pour mission de protéger les pèlerins qui se rendent à Jérusalem.

L’ordre canonial régulier du Saint-Sépulcre (1), chanoines du Saint-Sépulcre ou congrégation du Saint-Sépulcre est un ordre religieux de chanoines réguliers créé par Godefroy de Bouillon après la prise de Jérusalem en 1099. Suivant la règle de saint Augustin, cet Ordre a pour fonction la protection du Saint-Sépulcre mais aussi la vie liturgique du sanctuaire. Avec l’extension des conquêtes en Terre sainte, l’Ordre se développe en étendant sa mission de protection des lieux saints sur l’ensemble du Royaume franc de Jérusalem. Des hommes dévoués se regroupent alors en une sorte de confrérie laïque autour du chapitre du Saint-Sépulcre. Des croisés, restés en Terre sainte, mettent spontanément leurs armes au service des chanoines pour protéger et défendre le Saint-Sépulcre. Comme d’autres chevaliers engagés par les églises et les abbayes d’Occident, ils ont le statut de rendus, dit aussi donnés ou donats, c'est-à-dire de laïcs donnés à la religion, sans prononcer de vœux3.

Ces chevaliers laïcs ont alors une double dépendance, une dépendance religieuse envers les chanoines et une dépendance charitable envers les Hospitaliers qui les nourrissent et les entretiennent (2). (1) « Gerardo priori et ejus fratribus in ecclesia Sancti Sepulcri regularem vitam professis », « À Gérard, prieur, et à ses frères ayant fait profession de vie régulière dans l’église du Saint-Sépulcre ». (2) Michel de Pierredon, L’ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem : son histoire, son organisation, ses insignes et ses costumes, Paris, Ordre de Malte , 1928, 88 p. (présentation en ligne [archive]), p. 7-8

Les Hospitaliers, à leurs débuts en tous cas, ne sont pas des gens d'armes. Gérard Tenque, involontairement sans doute, en payant des gens d'armes et des chevaliers pour protéger les pèlerins sur les chemins de la Méditerranée à Jérusalem, engagea l'ordre de saint Jean de Jérusalem dans la direction de la militarisation. Si les Hospitaliers avaient participé en tant que gens d'armes, il n'aurait pas manqué d'historiens pour relater les faits comme ils le feront plus tard quand ce sera le cas. Delaville le Roux 1904,p.42.

À la mort de Baudoin Ier en 1118, la couronne est d'abord proposée à Eustache III, le frère aîné du roi, mais Josselin de Courtenay, qui ne tient pas rigueur à Baudouin du Bourg de l'avoir emprisonné en 1113, insiste pour que la couronne lui revienne. Baudouin d'Édesse accepte et le 14 avril 1118, dimanche de Pâques, est couronné roi de Jérusalem sous le nom de Baudouin II. Reconnaissant, Baudouin donne à Josselin le comté d'Edesse (1). C'est le roi de Jérusalem Baudoin I qui logea tout d'abord dans une aile de son palais, l'ancienne mosquée Al-Aqsa, les futurs templiers dont Hugues de Payns (1108). Le maître de l'ordre obtint par la suite du roi Baudoin II que leur soit prêté tout le palais situé devant le Temple. Baudoin II comprit immédiatement l'intérêt militaire qu'il avait de soutenir ce nouvel ordre à Jérusalem. Il accepta donc de transférer sa résidence dans la Tour de David, plus aisée à défendre, et laissa aux templiers son ancien palais qui devint la maison cheftaine de l'ordre. Les templiers l'agrandirent, le transformèrent et se firent construire une chapelle. Jérusalem devint alors la capitale de l'ordre où résidait le maître. Le projet est lancé, en terre Sainte, sous Baudoin Ier, roi de 1100 à 1118, puis tout s’accélère à partir de 1118 et l’élection de Baudoin II roi de Jérusalem. (1) Grousset  1934, p.566-9 et 572-3.

C’est le 30 décembre 1119, année de la fin de la reconstruction de l’édicule, qui protège la tombe du Christ au sein de l’église du saint-Sépulcre à Jérusalem, par les croisés, qu’est cité pour la première fois Hugues de Payns, sous le nom Ugo de Pazence, comme témoin sans titre ou description dans le cartulaire général de l’Ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem. Il a donc assisté à la restauration de la tombe du Christ. Ceci tendrait à prouver que l’Ordre du Temple est bien issu des Hospitaliers, comme le laisse entendre Bernard le Trésorier, ou du moins des chevaliers engagés par Gérard de Martigues.

En 1120, le 3 septembre selon Foucher de Chartres, Gérard Tenque de Martigues, grand maître des Hospitaliers meurt et est remplacé par Raymond du Puy qui donne une nouvelle consistance à l’ordre par de nouveaux statuts qu’il publia dans un chapitre général. Dans ces statuts on ne voit que deux classes de frères : celle des clercs et celle des laïcs. La distinction des chevaliers et des servants ne fut établie que dans la suite après le pontificat de Anastase IV. Raymond, qui avait distingué parmi ses frères hospitaliers beaucoup de vieux compagnons de Godefroi de bouillon, qui, nés dans les camps, élevés au bruit des armes, sentaient battre encore un cœur guerrier sous la robe de bure, assembla le conseil de l’Ordre, lui exposa les bienfaits qu’on en attendait et proposa aux hospitaliers de joindre aux trois premiers vœux qui les avaient réunis, celui de prendre les armes pour la défense de la religion. Les vieux soldats de Godefroi accueillirent avec force le projet et l’Ordre fut sur-le-champ classé en trois divisions : les prêtres et aumôniers, les frères servants qui devaient rester auprès des malades ; enfin les chevaliers, tous de noble extraction, tous ceignant l’épée et la cotte de maille sur le froc des religieux. A peine était-il en possession du magistère, qu’il marcha avec sa troupe au secours de la principauté d’Antioche. Histoire des chevaliers hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem…, vol 1 de René de Vertot.

C'est donc sous Raymond du Puy que l'Ordre prend un caractère plus militaire, dès 1120 bien que le premier acte daté dans lequel figure le nouveau grand-maître ne soit que du 9 décembre 1125. Un acte du 17 janvier 1126 nous apprend le nom d'un connétable des Hospitaliers, un certain Durand, qui semble bien avoir des responsabilités militaires. À partir de 1137, l'Ordre apparait dans les guerres que les troupes du royaume de Jérusalem mènent contre les Infidèles. Attaqué de toutes parts, le royaume de Jérusalem avait peine à tenir tête à ses ennemis. Ascalon, par sa position, en bord de mer sur le passage vers l'Égypte, était un danger permanent pour les Chrétiens, l'ennemi faisait de continuelles incursions dans la partie méridionale du royaume. Sur les conseils du roi Foulques, les Francs décidèrent de fortifier la position de Gibelin qui appartenait à L'Hôpital et qui se trouvait à l'est d'Ascalon. Les travaux dirigés avec célérité par le patriarche de Jérusalem, Guillaume de Messines, fut confiés naturellement aux Hospitaliers que cette désignation plaçait à un poste d'avant-garde particulièrement exposée. Delaville Le Roulx 1904-47.

C’est à ce moment qu’un certain nombre de chevaliers, comptants sans doute parmi les gens d’armes enrôlés par Gérard, demandent à créer leur propre Ordre sous la direction de Hugues de Payns. Ces futurs Templiers ne semblent pas avoir participé à la délivrance d’Antioche, conquise en juin 1119 par Ilghâzi d’Alep et secourue en cette même fin d’année par Baudoin II à la tête de sa noblesse et suivi par Raimond et ses Hospitaliers. Si Baudoin II a reçu l’onction à Pâques 1118, ce n’est qu’à la Noël 1119 qu’il fut couronné. Peu après, il assiste au concile de Naplouse le 23 janvier 1120, tenu de l'autorité de Garimond, patriarche de Jérusalem. Guillaume de Bures, connétable du roi est présent. l'Ordre du temple qui se nommait alors molitia christi prit naissance officiellement sous le nom de pauvres chevaliers du christ et du temple de salomon, en latin: pauperes commilitones christi templique solomonici. 

Hugues, cette fois sous la forme « Hugo de Peans », est à nouveau témoin et toujours sans titre dans une charte provenant de l’abbaye de Josaphat en terre sainte et probablement établie entre avril 1120 et avril 1121.croisades et pèlerinage- Robert Luttrell autour de la première croisade publication Sorbonne 1997.

Clairvaux

Les gens affluent dans la nouvelle abbaye de Clairvaux et Bernard convertit même toute sa famille : son père, Tescelin, et ses cinq frères y entrent en tant que moines. Sa sœur, Humbeline, prend également l’habit au prieuré de Jully-les-nonnains. Dès 1118, de nouvelles maisons, telle trois-fondaine, doivent être fondées pour éviter l’engorgement de Clairvaux. En 1119, Bernard fait partie du chapitre général des cisterciens convoqués par Etienne Harding, qui donne sa forme définitive à l’ordre. La charte de charité qui y est rédigée est confirmé peu après par Calixte II. Bernard fonde alors l’abbaye de Fontenay.

Terre sainte

Foulques d’Anjou, lors de son pèlerinage en 1119 ou 1120 est devenu attaché à l’ordre des templiers. Il est revenu en Occident en fin 1121, après quoi il a commencé à subventionner les templiers par le maintien de deux chevaliers en terre sainte pendant un an. Il est envisageable qu’Hugues de Payens ait fait route avec lui car en 1121, les Templiers s’établissent à Bure sur un domaine donné par Païen de Bure, fils ou neveu de Guillaume de Bure, futur prince de Tibériade, à moins qu’il ne s’agisse, comme son nom Païen peut l’indiquer, du gardien de ses terres de Bures à qui il donne pour mission de céder une partie de son domaine à Hugues de Payens. Guillaume de Bures ne semble pas être présent lors de cette donation car il n’y a pas d’acte officiel. Il s’agirait ici d’un accord verbal passé en terre sainte entre Hugues et Guillaume de bures nommé nouveau régent du royaume en 1123. Cette donation sera confirmée en 1127 lorsque Eudes de Grancey prend les Templiers sous sa sauvegarde. La tradition affirme que les chevaliers du Temple se fixèrent également à la Musse vers 1120 ou 1121, époque à laquelle leur fondateur Hugues de Paganis revint en France. La maison du Temple de Laumusse -Domus Templi en la Muce- était placée sur le territoire des sires de Baugé (Bâgé), à proximité de Mâcon, sur la route qui relie Lyon à Troyes et passant par Citeaux et Bures.
Cet établissement sera également appelé « Maison de la Chevalerie du Temple de la Muce », ou la Muci, de Mucia, domus Mucie, la Musce...
L'origine de la commanderie semble se trouver dans un don fait par les seigneurs de Bâgé d'une terre et d'une chapelle se trouvant au carrefour de deux voies de communication importantes pour l'époque. Bâgé était la 'capitale' de la Bresse

Espagne

Alphonse Ier recherche de nouvelles alliances pour ses projets de conquêtes. Entre la fin de l'année 1117 et le début de l'année 1118, il se rend personnellement en Béarn. Il se lie avec Gaston IV, le vicomte de Béarn, rentré de croisade. Cet homme, aux convictions religieuses profondes et militaire aguerri, qui a en particulier participé au siège de Jérusalem, devient rapidement un ami intime d'Alphonse Ier (1). Un concile, tenu en Béarn entre 1117 et 1118, confirme l'alliance des deux hommes. Grâce à une bulle de croisade accordée par le papeGélase II, une armée est levée dans le midi de la France. Un concile tenu à Toulouse en février 1118 par des évêques locaux, comme Guy de Lons, confirme les exemptions accordées aux chevaliers qui se croisent (2), comme Gaston IV de Béarn ou son demi-frère Centule II de Bigorre (3).En mars 1118, un grand nombre de chevaliers venus du royaume de France, parmi lesquels Rotrou du Perche (cousin de Alphonse Ier et Hugues Brito) et Robert Burdet, mais aussi des royaumes d'Aragon et de Navarre et des comtés d'Urgell et de Pallars, se concentre à Ayerbe sous le commandement d'Alphonse Ier. La troupe marche sur  Almudévar, puis conquiert  Gurrea de Gallego et Zuera. Au mois de mai, elle met le siège devant Saragosse (4). Le siège, long de neuf mois, s'achève par la chute de la ville, le 18 décembre 1118, à la suite de la prise de la tour de la Zuda, cœur politique et militaire de la ville. Gasto IV du Béarn reçoit le gouvernement de la cité en récompense de sa valeur. En 1120, après ses victoires à Saragosse et Calatayud, Alphonse Ier d'Aragon fit bâtir la ville de Monréal del Campo pour y stationner une armée destinée à protéger la région contre les Almoravides ayant repris Valence. Cet état de guerre permanent contre les sarrasins d’Espagne de l’autre côté des Pyrénées, est propice à la création de confréries militaires comme la confrérie de chevaliers de Belchite (1122), créée par Alphonse Ier d’Aragon peu après la prise de Saragosse ou celle de Monreal del Campo (fondée par Alphonse Ier en 1124). Histoire de la reconquista De Philippe Conrad : 1122 Belchite 1128 monréal.

Les premiers chevaliers venus peupler la place-forte de Monréal del campo furent envoyés par Bernard de Clairvaux. Celui-ci leur ordonna d'observer et de garder la règle de l'ordre des pauvres chevaliers du christ, à la différence près qu'ils pouvaient se marier. Neuf Chevalier du Conseil Magistral de l’Ordre du Chêne se constituent, selon le plan cistercien, en « Milice du Christ ». C’est ce collège qui transformera l’Ordre Navarrais du Chêne en Ordre du Saint Sauveur. Le nouvel Ordre jouira des mêmes avantages et prérogatives que l’Ordre du Temple de Salomon. L’Ordre du Saint Sauveur sera souvent considéré comme le premier Ordre Templier. A l'origine, les chevaliers de l'ordre du Saint-Sauveur de Monréal portaient sur l'estomac une croix rouge ancrée de gueules. (1)  Il semble d'ailleurs que les deux hommes se connaissaient avant, puisque le vicomte béarnais aurait gouverné la cité de Barbastro vers 1113, sans qu'on en connaisse la raison. (2) José Ángel Lema Pueyo, Alfonso I el Batallador, rey de Aragón y Pamplona (1104-1134), Trea, Gijón, 2008, p. 258. (3)  "Alfons I d'Arago, Gran enciclopédia catalana, consulté le 12 décembre 2012. (4) "Alfonso I", Grand Enciclopedia Aragonesa, mis à jour le 5 février 2010. 

Hugues de Châlons (Huas de Xalon), connu également sous le nom de Hugues brito de Ramerupt, est présent en 1123 sur une donation de l’évêque de Saragosse.

Les chevaliers Templiers rentrent alors en terre sainte.

Champagne

1125, Elisabeth de Varais, femme de Hugues de champagne donne naissance à un fils prénommé Eudes. L’enfant n’a que deux ans lorsque Hugues prend prétexte d’une dispute avec son épouse pour se faire déclarer incapable de procréer par les médecins. S’estimant désormais libéré des liens du mariage, il chasse Elisabeth et Eudes, transmet son héritage à son neveu Thibaud de Blois et part en terre sainte rejoindre l’Ordre du Temple pour se mettre au service de son propre vassal, Hugues de Payns. Bernard de Clairvaux écrira à ce sujet : si c’est pour Dieu que de comte vous vous êtes fait simple soldat, et pauvre, de riche que vous étiez, je vous félicite de tout mon cœur, et j’en rends gloire à Dieu, parce que je suis convaincu que ce changement est l’œuvre de la droite du Très-Haut. Je suis pourtant contraint de vous avouer que je ne puis facilement prendre mon parti d’être privé, par un ordre secret de Dieu, de votre aimable présence, et de ne plus jamais vous voir, vous avec qui j’aurais voulu passer ma vie entière, si cela eût été possible » Bernard de Clairvaux – éloge de la nouvelle chevalerie et vie de saint Malachie.